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MONTRÉAL, LE PARIS DE L’AMÉRIQUE

On a surnommé Montréal le Paris de l’Amérique en raison de sa langue française, de sa culture européenne et de son élégance architecturale. Dès la fin du 19ᵉ siècle, la ville s’est démarquée par sa vie nocturne animée, attirant même les Américains pendant la Prohibition. Ce surnom reflète à la fois le raffinement, l’esprit bohème et la liberté qui caractérisaient Montréal à cette époque.

“Si quelqu’un avait tenu un registre des boîtes de nuit qui ont ouvert et fermé à Montréal au cours des vingt dernières années, il aurait de quoi écrire une saga interminable de drames poignants, éclipsant sans peine les soap operas d’aujourd’hui.”

Al PalmerChroniqueur au Montreal Herald et The Gazette

L’évolution du nightlife montréalais au 20e siècle

1901-2000

L’arrivée des cabarets et du jazz (années 1920-1930)

Dans les années 1920, Montréal devient une ville de fête, surtout parce que l’alcool est interdit aux États-Unis mais reste légal ici. Beaucoup d’Américains viennent donc s’amuser dans les cabarets, où l’on peut boire, danser et écouter du jazz. Avec l’arrivée de musiciens afro-américains en visite des États-Unis, où sévit la ségrégation, Montréal devient un centre important pour le jazz, accueillant des légendes comme Louis Armstrong, Duke Ellington et Cab Calloway. Des clubs comme le Rockhead’s Paradise et le Café St-Michel deviennent des lieux incontournables.

L’âge d’or des cabarets (années 1940-1950)

Après la Seconde Guerre mondiale, Montréal connaît son époque la plus folle. La ville est surnommée “Sin City”, car elle est connue pour sa tolérance envers les jeux d’argent, la prostitution et les bars clandestins. Les cabarets comme le Faisan Doré, le Casino Bellevue, le El Morocco et Chez Parée attirent des vedettes du monde entier.

Les soirées sont animées par la Café Society de Montréal : des politiciens, des criminels, des artistes et des journalistes qui se mélangent dans ces établissements pour voir et être vus. Le crime organisé joue un rôle important dans la gestion de ces lieux, et Montréal se transforme en une sorte de Las Vegas du Nord.

Dans cette période faste, les cabarets remplacent en partie les grands théâtres qui, pour certains, ferment leurs portes. Des établissements disparaissent progressivement, laissant place à une vie nocturne plus centrée sur les spectacles de variétés, le burlesque et le jazz.

La fin des cabarets et le début d’une nouvelle ère (années 1960-1970)

Dans les années 1960, plusieurs facteurs accélèrent la disparition des cabarets :

La Révolution tranquille apporte des changements sociaux qui rendent ces lieux moins populaires.

La télévision devient le divertissement principal des gens, offrant un accès à des spectacles et performances depuis le confort du foyer.

Le maire Jean Drapeau lance une grande campagne contre la corruption et ferme plusieurs établissements liés au crime organisé.

L’Expo 67 joue également un rôle crucial dans cette transition. Si, à première vue, on pourrait croire qu’un tel événement aurait dynamisé la scène des cabarets, la réalité est plus complexe.

Expo 67 : un tournant majeur

Avec plus de 50 millions de visiteurs, l’Expo 67 attire une foule immense à Montréal, et les cabarets en profitent temporairement. Certains établissements adaptent leurs spectacles pour séduire un public international.

Cependant, l’Expo transforme aussi les attentes du public. Plutôt que de se rendre dans les cabarets traditionnels, les visiteurs découvrent une programmation culturelle variée directement sur le site de l’Expo, incluant des spectacles musicaux, des expositions artistiques et des performances avant-gardistes.

L’Expo 67 accélère donc le déclin des cabarets :

L’administration Drapeau veut projeter une image plus propre et moderne, réprimant les lieux liés au crime organisé et aux jeux de hasard.

Le Quartier Latin et d’autres centres culturels attirent le public vers le théâtre, la musique pop et rock.

La montée du rock et des discothèques détourne le public des spectacles traditionnels de cabaret.

Des cabarets aux discothèques et clubs modernes (années 1970 à aujourd’hui)

Dans les années 1970, 1980 et 1990, les discothèques et les salles de concert prennent le relais des anciens cabarets. Des endroits comme le Lime Light, les Foufounes Électriques et le Spectrum deviennent des références en matière de nightlife. Montréal se fait aussi connaître avec de grands festivals comme le Festival de Jazz de Montréal, et le Quartier des spectacles devient le cœur de la vie culturelle.

Avec le déclin des grands théâtres et cabarets, la scène nocturne montréalaise se diversifie :

• L’ouverture de la Place des Arts en 1963 marque un virage vers un modèle plus institutionnalisé du spectacle vivant.

• L’essor des concerts rock au Forum de Montréal, puis au Centre Bell, renforce la place de la musique live.

• Des festivals comme Juste Pour Rire et les Francofolies deviennent des piliers du divertissement montréalais dès les années 1980-1990.

Conclusion

L’histoire du nightlife montréalais est celle d’une constante évolution. De la période florissante des cabarets et du jazz, en passant par l’âge d’or du crime organisé et du divertissement extravagant, jusqu’à la montée des discothèques et des grands festivals, Montréal a su s’adapter aux nouvelles tendances culturelles.

Si l’Expo 67 et la télévision ont contribué à la disparition des cabarets, ils ont aussi marqué le début d’une nouvelle ère où le nightlife montréalais s’est diversifié et modernisé. Aujourd’hui, même si la ville a changé, elle conserve son esprit festif et sa réputation d’être un haut lieu de la musique et de la fête en Amérique du Nord.

Archives Monique Leyrac. Référence: Archives Monique Leyrac, 1948, Wikipedia

Au Faisan Doré

En 1947, les frères Martin transforment leur cabaret, le Café Val d’Or, en restaurant pour contourner les restrictions sur leur permis d’alcool, créant ainsi le Faisan Doré. Jacques Normand y devient l’animateur vedette et contribue à en faire une boîte à chansons célèbre, où de jeunes artistes québécois, comme Monique Leyrac et Fernand Gignac, trouvent leur première chance. Le Faisan Doré accueille également des talents internationaux tels que Pierre Roche et Charles Aznavour. Malgré son succès, le cabaret ferme en 1950 après le départ de Jacques Normand, les frères Martin préférant fermer plutôt que de le remplacer. En 1951, le Café Montmartre prend la relève dans les mêmes locaux.

“Vous commencez la semaine prochaine, monsieur Normand. Si vous ne me décevez pas, après le Val d’Or, il y en aura beaucoup d’autres. Vous pouvez en être certain.”

Vic CotroniFondateur de la famille mafieuse Cotroni

L’évolution du nightlife montréalais au 19e siècle

1801-1900

Le nightlife montréalais au 19ᵉ siècle : une évolution en douceur

À l’époque, Montréal n’avait rien à voir avec la ville festive qu’elle est devenue au 20ᵉ siècle. La vie nocturne était plus calme et influencée par les traditions britanniques et françaises, la religion et l’industrialisation.

Tavernes et salons de boisson : des lieux populaires

Les tavernes étaient les endroits où se retrouvaient les ouvriers, marins et soldats pour boire et discuter. C’était un univers majoritairement masculin, où l’on parlait politique et travail autour d’un verre de bière ou de whisky.

Les salons de boisson, eux, étaient plus chics et attirent une clientèle plus aisée. On y trouvait parfois de la musique live, mais l’alcool y était strictement réglementé, notamment sous la pression de l’Église catholique.

Le théâtre et l’opéra : le divertissement des bourgeois

À partir des années 1820, Montréal commence à se doter de théâtres. Le Théâtre Royal, ouvert en 1825, devient le centre de la scène culturelle, accueillant des troupes britanniques qui jouent du Shakespeare et du vaudeville.

Vers la fin du siècle, d’autres salles prestigieuses comme le Monument-National et le Théâtre Français voient le jour, offrant une programmation variée allant du drame à l’opéra.

Hôtels et restaurants : le luxe et les mondanités

Avec le développement économique, de grands hôtels comme le Windsor Hotel (1878) organisent des bals et des soirées mondaines pour l’élite montréalaise.

Les restaurants chics du Square Dominion ou du Vieux-Montréal offrent des repas raffinés, attirant une clientèle fortunée. Pour les femmes, ces lieux sont souvent les seules options pour une sortie nocturne respectée.

Cirques, foires et spectacles ambulants : le divertissement de rue

En plus des théâtres, Montréal accueille des troupes itinérantes de cirque et des prestidigitateurs. Dans les années 1850, le Calvert’s Canadian Circus fait sensation en proposant des spectacles temporaires en ville.

Les fêtes foraines et carnavals, bien que plus rares, apportent aussi une ambiance festive en soirée.

Jeux et maisons closes : le côté sombre du nightlife

Dès les années 1860, Montréal voit émerger des maisons de jeu et des bordels, notamment dans ce qui deviendra le Red Light District.

Bien que ces activités soient illégales, les autorités ferment souvent les yeux en échange de pots-de-vin. Cette tolérance marque déjà le début de la réputation de Montréal comme une ville où l’on peut s’amuser malgré les interdits.

L’influence des réformateurs et de l’Église

Vers la fin du siècle, des mouvements religieux et sociaux tentent de limiter les excès. Des campagnes pour interdire l’alcool se multiplient, et des lois plus strictes sont mises en place contre le jeu et la prostitution.

L’Église catholique joue un rôle clé en exerçant des pressions pour fermer certains établissements jugés immoraux.

Conclusion : une ville en transition

Le nightlife de Montréal au 19ᵉ siècle était bien différent de ce qu’il deviendra plus tard. Entre tavernes populaires, théâtres prestigieux et lieux plus clandestins, la ville commence à façonner une identité nocturne unique.

À la fin du siècle, on sent déjà émerger ce qui fera de Montréal une capitale de la fête au 20ᵉ siècle : une scène nocturne vibrante, où se mêlent culture et plaisirs interdits.

Théâtre Royal, BAnQ

Le Théâtre Royal

Le Théâtre Royal-Molson, fondé par John Molson, fut la première salle exclusivement consacrée au théâtre et aux arts de la scène au Canada et est considérée comme la première véritable salle de spectacle à Montréal, avec une scène correctement équipée, des coulisses spacieuses et un auditorium. C’est sur la scène du Théâtre Royal en 1842, que le célèbre Charles Dickens est lui-même monté en tant qu’acteur.

“Le Canada a occupé et conservera toujours une place de choix dans ma mémoire.”

Charles DickensÉcrivain anglais

L’évolution du nightlife montréalais au 18e siècle

1701-1800

Début du 18e siècle (1700–1760) – Montréal sous la Nouvelle-France

Le nightlife à Montréal au 18e siècle était très différent de celui des siècles suivants.

À l’époque, Montréal était une petite ville fortifiée, influencée par la religion et les traditions rurales. Ce n’était pas une ville de fête : la vie le soir était tranquille, surveillée de près par l’Église, et très marquée par la culture française, puis britannique après 1760.

  • Montréal est une petite ville coloniale (environ 3 000 à 5 000 habitants).
  • La ville est entourée de murs, avec un couvre-feu la nuit.
  • Les gens se couchent tôt, car ils vivent selon le rythme du soleil.

Ce qu’on pouvait faire le soir

  • Participer à des veillées dans les maisons : musique, contes, chants et danses traditionnelles.
  • Aller dans quelques auberges pour boire un verre (certains sont permis, d’autres interdits).
  • Célébrer des fêtes religieuses ou de village (comme Noël ou la Saint-Jean), parfois le soir.

Mais :

  • L’Église surveille la moralité : elle interdit ou décourage la danse, les chansons en public et l’alcool.

1760–1791 : Après la Conquête britannique

• Les Britanniques prennent le contrôle de la ville en 1760.

• De nouveaux arrivants (soldats, commerçants anglais) amènent une culture plus tolérante envers les sorties.

Ce qui change :

• Les tavernes à l’anglaise apparaissent : on y boit, chante, joue aux dés.

• Dans le Vieux-Montréal, surtout près du port, les soirées deviennent plus animées.

• Des bals, concerts et pièces de théâtre sont parfois organisés par les soldats et officiers.

Mais :

• L’influence de l’Église reste forte chez les Canadiens-français.

• Ces nouvelles activités sont surtout pour les anglophones ou les militaires.

Fin du siècle (1790–1800) : Premiers signes d’une vraie vie nocturne

  • Montréal grandit (environ 9 000 habitants vers 1800).
  • On voit apparaître des cafés, maisons de thé et lieux ouverts en soirée (surtout côté anglophone).
  • Les riches Britanniques fondent des clubs privés et cercles de lecture.
  • Le théâtre amateur commence à exister, même si le clergé reste méfiant.

En résumé

Le nightlife montréalais du 18e siècle était modeste, rural, et très contrôlé par la religion au début. Peu à peu, l’arrivée des Britanniques et la croissance de la ville ont apporté un peu plus d’animation le soir — surtout pour les anglophones.

Le Soleil, 30 juin 1933, BAnQ

Le Café Dillon

Après la Guerre de la Conquête, les premières représentations de Molière au Canada se sont déroulées en février 1774 à Montréal, au Café Dillon établi dans le grand salon de l’ancienne résidence du notaire Antoine Foucher. Sous la direction du capitaine Edward Williams, « Le Bourgeois gentilhomme » et « Le Médecin malgré lui » ont été joués dans ce modeste lieu sombre, chauffé au feu de bois et éclairé à la bougie, reflet de la vie de l’époque. Antoine Foucher, influent seigneur et membre du conseil supérieur de la Nouvelle-France, est aussi l’ancêtre de Louis-Joseph Papineau, chef des Patriotes.

“Le Café Dillon a également été le lieu de fondation de la première bibliothèque de Montréal, le 7 mars 1796.”

Marcel LajeunesseBibliothécaire, professeur et historien québécois

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