CAFÉ ROYAL
Le Café Royal était un restaurant situé au 97 rue Sainte-Catherine Est à Montréal, et il a été en activité de 1942 à 1948.
Le Café Royal était détenu par Armand Courville, un lutteur professionnel à la retraite, et Vic Cotroni, considéré comme l’un des fondateurs de la mafia montréalaise.
Ce texte a été assemblé à partir d’archives de journaux | 27 juillet 2024 |
Le Café Royal était détenu par Armand Courville, un lutteur professionnel à la retraite, et Vic Cotroni, considéré comme l’un des fondateurs de la mafia montréalaise. Les gérants du café étaient les frères Marius et Edmond Martin, membres de la mafia marseillaise impliqués dans le trafic d’héroïne à Montréal.3,4,5,6,7,8,9,10
Armand Courville 1935-1938
Cote : P833,S1,D319 Fonds La Presse – Archives nationales à Montréal Id 644125, BAnQ
Armand Courville et Vic Cotroni furent propriétaires entre autres du Café Royal, du Café Val d’Or, du Café Vic, du Café Pal’s, et surtout du cabaret Au Faisan Doré, le premier grand cabaret francophone du Québec animé par Jacques Normand. De nombreuses vedettes de la chanson francophone y ont fait leurs débuts, dont Charles Aznavour, Raymond Lévesque, Fernand Gignac, Monique Leyrac et Tino Rossi.3,4,5,6,7,8,9,10
Fernand Gignac (14 ans) remporte le premier prix avec son interprétation de Maître Pierre au cabaret Au Faisan Doré
Armand Courville représente une figure marquante de l’histoire québécoise. Aîné d’une famille de 16 enfants, il a commencé à travailler jeune pour soutenir la famille. Son père, qui avait débuté comme cocher, a ensuite acquis un commerce de fruits et légumes. Courville parlait de son père avec une grande affection et respect, le décrivant comme un homme très fort malgré sa petite taille. Cette force a sans doute influencé Armand, qui a débuté dans la lutte avant de devenir instructeur de lutte au club Saint-Paul de Ville-Émard. Il a pratiqué la lutte pendant 15 ans et a représenté le Canada pendant 3 ans. C’est à cette époque qu’il a rencontré Vincent (Vic) Cotroni, alors apprenti-charpentier, qui aura une brève carrière dans la lutte.9
Vic Cotroni, Armand Courville, Wikipedia
En plus de ses activités légitimes en tant qu’entraîneur, Armand Courville se consacrait, pendant son temps libre, à des activités moins légitimes comme de l’intimidation électorale, principalement au service de l’Union nationale et parfois du Parti libéral. C’est dans ce cadre tumultueux que Courville et Cotroni ont établi une relation d’affaires.11
Café Royal (1942-1948)
Posséder un club à l’époque nécessitait des relations politiques. Les permis de boisson étaient accordés par la police provinciale, tandis que les permis de restaurant étaient délivrés par la Ville de Montréal, sans lesquels les clubs ne pouvaient fonctionner.9
Le Café Royal a perdu son permis d’alcool en 1948 et est rebaptisé le cabaret La Ceinture Fléchée le 15 mars 1948.1,2,12
La Ceinture Fléchée
Le Canada, 19 mars 1948, BAnQ
À l’époque, l’avocat Pax Plante, célèbre pour ses actions contre le crime organisé à Montréal pendant les années 1940 et les années 1950 et contre la corruption dans l’administration municipale, dominait la scène québécoise et avait réussi à influencer plusieurs journalistes qui ont commencé à diffamer le clan Cotroni.9
Pacifique « Pax » Plante 1950-1973
Cote : P833,S2,D4387 Fonds La Presse – Archives nationales à Montréal Id 656514, BAnQ
Courville a toujours veillé attentivement sur ses affaires tout en déléguant certaines tâches. Par exemple, au cabaret Faisan Doré, les frères Martin, qui géraient le club, donnaient l’impression d’en être les propriétaires. Courville se rendait souvent incognito au Faisan Doré, où il était traité comme un client ordinaire par le personnel. Lorsqu’il remarquait un serveur demandant un prix excessif pour une consommation, il en informait Vic, qui prenait les mesures nécessaires.9
Un groupe d’artistes réunis au Faisan Doré, 1948, Archives Monique Leyrac
Durant sa carrière, Courville a également été organisateur Libéral et a même dirigé la ‘’police spéciale’’. En prenant en charge le Café Royal, grâce aux Libéraux, il offrait des emplois aux organisateurs électoraux et collaborait avec le chef de la police provinciale de l’époque, Louis Gagaille. Gagaille et Courville, amis grâce à leurs fonctions, se sont associés dans l’élevage de visons pendant 10 ans.9
La Patrie – l’hebdo des canadiens-français, 13 juillet 1975, BAnQ
Avant de s’engager dans l’entreprise Reggio Foods, Courville avait travaillé dans le domaine immobilier, achetant et revendant des maisons à profit. En 1965-66, il a acquis Reggio et Sun Valley Packing, deux entreprises artisanales, et les a transformées en Reggio Foods. Ils fournissaient le pepperoni à toutes les pizzerias en ville, avec des ventes croissant de 18 à 22 tonnes par semaine.9
Armand Courville, 23 mai 1975
Michel Gravel .- 23 mai 1975 Cote : P833,S5,D1975-0206 Fonds La Presse – Archives nationales à Montréal Id 660081, BAnQ
Armand Courville avait maîtrisé l’art de la manipulation depuis longtemps. Après de nombreuses années dans les affaires, il avait appris à manier les subtilités du discours. Alors que le juge Dutil cherchait à prouver en 1975 que Vincent Cotroni était le parrain de la mafia montréalaise, Courville n’a admis que Vic était le parrain de son fils Vincent.9
La lutte au crime organisé au Québec : rapport d’enquête sur le crime organisé et recommandations / Commission de police du Québec, Enquête sur le crime organisé, 1976, BAnQ
Armand Courville est décédé le 1er février 1991 à l’âge de 79 ans. Il a été inhumé dans la plus grande simplicité, entouré uniquement de sa famille et de ses amis les plus proches du milieu de la lutte. Bien qu’il avait pris sa retraite depuis longtemps et soit décédé après une longue maladie, la cérémonie funèbre était très différente de celle des obsèques de Vic Cotroni en 1984. Aucune personnalité célèbre de la mafia n’était présente, bien que quelques figures notables du milieu, pour la plupart âgées, aient assisté aux funérailles. La majorité des participants étaient d’anciens lutteurs et promoteurs. Malgré sa longue association avec le célèbre mafieux italien Vic Cotroni, Courville avait toujours nié tout lien avec le monde de la mafia. Lors des audiences de la Commission d’enquête sur le crime organisé en 1975, il avait suscité le rire général — sauf peut-être de trois commissaires — en affirmant avoir découvert l’existence de la mafia uniquement à travers des livres et le film « Le Parrain ».13
The Gazette, 28 novembre 1973, newspapers.com
Néanmoins, la CECO avait prouvé que Courville était le principal partenaire de Cotroni dans plusieurs établissements nocturnes et des entreprises alimentaires. Au sein du clan Cotroni, il avait joué également un rôle crucial grâce à ses relations dans la politique municipale et provinciale, et parfois dans la police. Depuis la mort de Cotroni en 1984, et l’emprisonnement de son frère Frank Cotroni, la présence du clan Cotroni s’était considérablement estompée.13
Armand Courville a été sans aucun doute parmi les partenaires non-italiens les plus influents et les plus respectés de la famille Cotroni-Violi. Ami intime de Vic Cotroni pendant plus de 40 ans, ce Canadien Français a presque toujours été son principal associé dans ses affaires, qu’il s’agisse de maisons de jeu, de cabarets, de restaurants, d’entreprises d’importation de produits pharmaceutiques, de compagnies immobilières ou d’usines de traitements de viandes. On se souviendra qu’il a été associé non seulement avec Vic Cotroni, mais avec Paolo Violi dans la firme Reggio Food Inc de Montréal-Nord.14
Maurice Cusson, criminologue de l’Université de Montréal: « C’est une tradition, les liens entre la mafia et le monde du spectacles. »15
Armand Courville était père de trois enfants et vivait dans le quartier Rosemont.9
Armand Courville
Michel Gravel .- 1975 Cote : P833,S2,D1246 Fonds La Presse – Archives nationales à Montréal Id 648602, BAnQ
Le local du Café Royal, de La Ceinture Fléchée, du Café ABC, du Café Vic, du Café Pal’s, est occupé par les Foufounes Électriques depuis 1983.