Black Bottom (Montréal)
Club de jazz mythique de Montréal, actif de 1957 à 1976, d’abord au cœur de la Petite-Bourgogne, puis dans le Vieux-Montréal. Réputé pour ses after-hours légendaires, le jeu incandescent du guitariste Nelson Symonds et une programmation audacieuse mêlant jazz et soul, il a accueilli plusieurs figures majeures, notamment Miles Davis, Thelonious Monk et Art Blakey & The Jazz Messengers.
1. Présentation
Fondé en 1957 par Charlie Burke, le Black Bottom ouvre d’abord au 1350 rue Saint-Antoine Ouest, dans la Petite-Bourgogne, au cœur de la communauté noire montréalaise. Il devient rapidement l’un des clubs les plus vivants de la ville, réputé pour ses prix accessibles, ses jams nocturnes et l’accueil de musiciens majeurs de passage à Montréal.
2. Origines & caractère du lieu
Lorsque Charlie Burke ouvre le Black Bottom en 1957, il ne dispose que de 200 $. Le club, aménagé dans un sous-sol délabré, présente un décor rudimentaire : tables bancales, chaises pliantes, bibelots de l’Armée du Salut, fresques colorées pour masquer fissures et humidité. Malgré cette pauvreté matérielle, l’endroit dégage un charme chaleureux et authentique. [1]
Le menu reflète la culture afro-caribéenne : ailes de poulet, riz, haricots à œil noir, sauce créole préparée par le chef Roméo. Le club ne vend pas d’alcool : on y boit du café chaud et, pour 1 $, on peut écouter du jazz toute la nuit. [2]
L’établissement devient rapidement un centre nocturne du quartier : les foules s’y pressent et les files s’étirent chaque fin de semaine, attirées par l’énergie des jams improvisés.
3. Deuxième adresse — 22 rue Saint-Paul Est (1968–1976)
Exproprié fin 1967 dans le cadre d’un programme de rénovation urbaine de la Petite-Bourgogne, le Black Bottom rouvre en 1968 au 22 rue Saint-Paul Est. [1]
Burke rénove l’ancien Sam’s Café, tout en préservant l’esprit du club : proximité, improvisation, communauté. Voici s’y succéder les grandes figures du jazz moderne ainsi que des formations soul. Parmi les invités de marque : Thelonious Monk, Art Blakey & The Jazz Messengers, Miles Davis, Eddie Harris, Tony Williams. [1]
Le club devient plus tard le bar Nuit Magique, dirigé par Bobby Di Salvio et Keith Du Mouchel. [4]
4. Programmation & artistes
Le club présente une programmation centrée sur le jazz moderne et le soul, avec résidences, nuits thématiques, et jams prolongés jusqu’au matin. De nombreux musiciens terminent leurs engagements ailleurs avant de venir jouer au Black Bottom.
- Miles Davis
- Thelonious Monk
- Art Blakey & The Jazz Messengers
- Tony Williams
- Eddie Harris
- Trudy Pitts
- House band : Nelson Symonds Trio
5. Nelson Symonds & les jams
La réputation du Black Bottom repose en grande partie sur Nelson Symonds, guitariste résident pendant plus de cinq ans. Considéré par ses pairs comme l’un des plus grands guitaristes de jazz au monde, il attire au club les musiciens montréalais et étrangers, qui viennent jam-mer jusqu’à l’aube.
6. Suite & héritage
Au tournant des années 1970, le Black Bottom poursuit son activité rue Saint-Paul Est, avant de céder la place à Nuit Magique. Plus tard, Charles Burke déménage à Vancouver, où il travaille comme charpentier. [5]
Le Black Bottom demeure un lieu fondateur pour l’histoire du jazz montréalais : incubateur de talents, espace communautaire, temple d’improvisation, et refuge nocturne des musiciens.
7. Chronologie
8. Notes & sources
- Rendez-vous des grands du Jazz, La Presse, Pol Chantraine, 29 mars 1969.
- John Gilmore, Une histoire du jazz à Montréal, 1988.
- « La plus vieille boîte de jazz déménage… », Le Petit Journal, 14 avril 1968.
- The Montreal Star — « The night crowd’s inn », 27 mai 1978.
- http://boppin.com/2006/04/charles-burke-and-black-bottom.html
- Wes Montgomery — témoignage (YouTube). Voir l’entrevue.

